Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Talons aiguilles, jean usé
Archives
26 septembre 2006

La fête de l'Huma (Part I)

Je ne l'avais jamais faite.

     Sans_titre

"Faire la fête de l'huma"... Étape initiatique du bon jeune français 15-25 ans qui veut changer le monde... et qui a faim!
On m'en avait parlé comme d'une gigantesque foire aux idées politiques, d'une macro bourse des échanges philosophiques... On m'avait aussi prévenue pour les grillades à chaque stand, pour les huîtres à la fédération PC de Loire-Atlantique, le Kébab au canard du Quercy, le mojito dégueulasse des fidels au bar cubain...

On m'avait mis au courant pour l'ambiance bon enfant, le mélange des genres entre discours politiques et politistes, les politesses feintes aux pissotières bondées. Les sourires solidaires  des "sympathisants" qui se retrouvent après un an. Les bambins qui rient et pleurent dans la paille en attendant les frites. Les slogans gras harangués
sur fond de chanson de Renaud.  Les stars médiatiques de la gauche civile, les chefs de clans UNEF, SOS Racisme... qui se sentent bien, et qui ont le temps de discuter avec les passants, et... de leur faire signer des pétitions, comme au temps où ils étaient pas chefs.

Tout ça on m'avait dit. On m'avait dit que ça me plairait. Mais je n'aurais jamais compris.

Premier contact avec la "fête de l'huma": un voyage cosmique de dix minutes dans une navette, de la sortie du RER à l'arrivée au parc des expositions. Incursion violente, je préviens. Je vois deux places au fond du bus. Je me dis qu'elles sont pour moi et mon cavalier. Je m'y dirige donc. Je me pose et j'observe. Une bande de cinq-six jeunes délurés a pris d'assaut le fond du bus. Ils sont complètement grunges, très jeunes (16-17 ans), très sales (observation attentive des muqueuses et des ongles à l'appui... pas de jugement sans fondement!), alcolisés, percés en des endroits où j'aurais pas mis des trous personnellement, et pour la plupart leur braguette est ouverte, leurs boutons sont déboutonnés, leur lacets et leur gueule; défaits. Bon. Mais ouste les a priori, ils sont jeunes, ça leur passera. (Enfin... pour le gigantesque trou dans l'oreille causé pas un anneau de 2 cm de diamètres, faudra coudre quand même...)
Pour préparer sa soirée à la fête, l'un d'entre eux, déjà bien entamé sort une bouteille d'un liquide qui se finit sûrement pas -akoff ou -ikoff, en en verse dans un petit biberon. Le symbole est fort, le choc est brutal. Un gamin qui joue au gamin avec un liquide destiné à l'infantiliser encore plus... je me demande forcément s'il a envie de grandir.
Ses camarades hurlent comme des putois: ils manifestent leur joie.
Une potentielle jolie fille (je considère, mais c'est subjectif, qu'il y a plus sexy qu'un vieux froc XXL taché de ketchup, et qu'un visage habitué aux trous de piercings) se lève de sa place. C'est la belle de la bande, elle fait son numéro, et exhibe son animal de compagnie top cliché: un rat.
C'est fou cette tendance qu'on a tous à aimer se plier aux codes sociaux, me dis-je. La fille peut pas être plus cliché. Elle ne pourrait pas se mettre moins dans une case qu'elle ne le fait. Sous prétexte de vouloir sembler originale aux yeux des autres, de la société, elle en est en fait le pur produit, d'aucun vieux cons qualifieraient sans tarir de "déchet". 100% jeune rebelle authentique. Le style rebelle, le parler rebelle, les marques rebelles, la picole rebelle, la consommation rebelle, l'animal rebelle, la braguette rebelle. Mais tout en fait est ultra normé et rigide chez cette fille de 17 ans.

                                                                                 

                                                  Cannabis
                             Un des symboles identificateurs de cette jeunesse. Le début du code.


Comment fera-t-elle me dis-je, le jour où elle devra se présenter devant un employeur, son oreille anormalement pendante et ses trous au visage? Elle lui dira quoi?


Dois-je insister sur la scène où la fille roule des patins à son rat, après lui avoir donné à manger du fromage? Des détails sur les fils de bave interminables entre le pauvre rongeur et le percing bucal de la gonzesse? Sur mon l'état de mon appétit après avoir assisté à ça??? Non?? Vraiment??!


Publicité
Commentaires
M
d'accord pour l'inconscience de l'adaptation, même si j'y vois une forme de soumission mais c'est sans doute ça participer à la société: abandonner certains idéaux. Enfin on est loin des considérations que doivent avoir ces jeunes (là aussi je porte un jugement)
M
merci pour ton commentaire :) <br /> Je pense que notre société fabrique entre autres, des jeunes totalement à côté de la plaque. <br /> Mais d'une: je l'espère, pour la plupart d'entre eux, ça n'est qu'une période. <br /> Et deux: tout est question de valeur. Je porte un jugement sur eux, mais je suis consciente que ce jugement est lui-même formaté, conditionné par des éléments qui me sont propres et qui sont contestables. Je ne prétends pas détenir la vérité universelle.<br /> Je persiste donc dans ce cadre: on vit dans un système très expéditif, où la vie c'est le travail, car c'est pour l'heure le seul moyen de vivre et survivre quand on est pas rentier. <br /> <br /> Je m'interrogeait sur les futures capacités d'adaptation de ces jeunes au monde du travail (mais pas seulement...!. J'ai eu un sentiment d'isolement et de marginalité en les voyant. Ils étaient bien entre eux, et complètement hermétiques aux autres; la preuve en est, leur comportemment très envahissant dans un bus, comme s'ils avaient été seuls.<br /> Et puis, on calque pas consciemment son "style" sur les attentes des patrons. On le fait inconsciemment. C'est ça la socialisation; l'apprentissage des normes qui font qu'on est capables de participer à la société. Nan? :)
M
je comprends évidemment ce que tu veux dire par là, et y a bien sur des limites au j'menfoutisme mais doit on calquer sa vie, son "styyyyyle" comme on doit certainement dire dans certains milieux sur le potentiel futur employeur? N'est-ce pas plus conformiste finalement que de se complaire dans un pseudo-anticonformiste guère plus original?
Talons aiguilles, jean usé
  • Mon but: devenir journaliste. Le détail de mon parcours, les embûches, les succès, les rencontres. Les coups durs, les coups bas, les coups de poing, les coups de poker : à la conquête d'un nouveau monde...
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Publicité